Exposé Etat totalitaire et Etat de droit

Kelsen : absolue identité entre l'Etat et le droit, qui constitue un seul et même ordre de contrainte. Il ramène l'Etat à l'ordre juridique. Dans ce cas, le problème de l'Etat de droit peut être envisagé de façon strictement positive, sans jugement de valeurs sur la norme juridique. (ce que critique d'ailleurs Léo Strauss, avec son exemple sur les cannibales). Chaque fois qu'on a un ordre de contrainte relativement centralisé, offrant les caractéristiques d'un véritable ordre juridique, on a un Etat de droit. Ce qui importe, ce n'est pas le degré de sécurité juridique, mais l'existence d'un ordre de contrainte efficace.

Mais surtout, le totalitarisme pénètre, par le droit, tous les niveaux de la société, que ce soit rapport individu-Etat, individu entre eux, ou individu avec lui-même : le droit impose son idéologie dans tous les aspects de la société : la notion d'intimité n'existe plus, mais le droit reste là : il y a bien, au sens formel de la définition, une normalisation des rapports de l'Etat et des individus.

La hiérarchie des normes de Kelsen apparaît comme un ensemble pyramidal, dont la norme supérieure est la Constitution, mais qui tire sa validité d'une norme supérieure : c'est une norme hypothétique, présupposée. Cette norme ne prescrit aucun contenu, car Kelsen voulait écarter la vision du jusnaturaliste du droit.

Cpdt, et comme le fait remarquer Jacques Chevallier, la théorie de l'Etat de droit s'est développée sur un certain terreau idéologique : l'Etat de droit présuppose une vision de l4etat perçu comme exprimant l'idéal de Justice et repose sur le primat des libertés et droits de l'Homme reconnu sous la Révolution Française. Dès lors, il n'est plus question, quand on se penche sur la définition matérielle de l'Etat de droit, d'effectuer un rapprochement avec l'Etat totalitaire.

En pratique, on sent dans l'oeuvre de Kelsen que l'Etat de droit a vocation à désigner un type de régime qui répond aux exigences démocratiques : c'est M Habermas en 1992, qui va d'ailleurs proposer l'abolition de la frontière entre Etat de droit et démocratie. En effet, comme un organe juridictionnel est mis en place pour contrôler le respect de la hiérarchie des normes par l'Etat, les pouvoirs constituant et législatif sont ainsi protégés et mis en oeuvre : ces derniers représentent l'essence de la démocratie.

L'Etat totalitaire broie l'individu ; selon Arendt, il tue la personne juridique et anéantie l'identité en noyant l'individu dans la masse, qu'elle appelle la populace. Arendt parle métaphoriquement d'abolition de l'espace qui existe naturellement entre les hommes. Il annule toute liberté. Il détruit aussi toute spontanéité : il faut empêcher les actes imprévus.

Dans un système de parti unique, le sens du compromis n'existe pas (acceptation de la légitimité des autres points de vue), on est alors très loin de l'Etat de droit-démocratie, sachant en +, que la terreur est aussi utilisée pour faire disparaître tout opposant, et ceux qui sont visés par l'idéologie, toute personne qui pourrait être suspecte.