La leçon de Eugène Ionesco (Fiche de lecture)

La jeune fille annonce d'emblée qu'elle envisage de préparer le " doctorat total " pour satisfaire ses parents. Le professeur propose de débuter par une leçon d'arithmétique. Son élève se déclare être à " sa disposition ", expression faisant naitre une certaine ambiguïté dans leur relation et le désir du professeur pour son élève.

Ils abordent l'addition au degré le plus simple qui existe (1+1, 2+1, etc.) et le professeur semble s'émerveiller (à l'excès) du fait qu'elle maitrise ce niveau élémentaire de savoir. Mais, en passant à la soustraction, on se rend compte que l'élève n'est capable d'aucune réflexion à propos de données simples (il lui est impossible de résoudre 4-3 ou de savoir si 3 est plus grand que 4). Le professeur explique toute cette matière en l'illustrant au moyen d'exemples farfelus qui font référence au corps de l'élève : " Si vous aviez eu deux nez, et que je vous en aurais arraché un... Combien vous en resterait-il maintenant ? " (p. 45).

Paradoxalement, l'élève se révèle capable de réaliser des calculs extrêmement complexes (p. 52). Cette capacité est due à une mémorisation de l'ensemble de toutes les multiplications possibles. Le professeur se montre légèrement exaspéré d'une réussite qui ne s'accompagne pas de la réflexion traditionnellement nécessaire à ce genre d'exercice.

Le vieil homme propose alors un exercice d'un autre genre : l'étude de la langue. La leçon est marquée par de nombreuses interventions loufoques et par la dégradation de la relation entre le professeur et son élève. Dorénavant, la leçon est magistrale, c'est-à-dire que l'élève intervient fort peu et est rabrouée sans cesse. La bonne comprend vite le danger que court la jeune femme et intervient immédiatement. Son patron la renvoie à la cuisine et aborde la leçon de " philologie ". L'élève n'intervient plus que pour se plaindre sans cesse d'un mal de dents (prémonitoire ?).

Hors de lui, le professeur passe aux injures et aux menaces, et amorce la séance d'hypnose qui évolue selon les exigences du verbe et la toute-puissance de son propre désir. L'élève se voit contrainte de répéter incessamment un seul et même mot : couteau, tandis que le professeur tourne autour d'elle.

La future victime évoque le mal qu'elle ressent dans sa gorge, ses épaules, ses seins, ses hanches, ses cuisses et son ventre. Enfin, l'homme brandit son couteau, tandis que l'élève pousse un cri et s'affale. Après le meurtre, le professeur s'affole et appelle sa bonne à l'aide.

Désemparé, le professeur refuse de reconnaitre ses torts. Il se fait rappeler à l'ordre par la bonne qui, à la manière d'une maman, le sermonne. Elle nous apprend que c'est déjà la quarantième fois de la journée qu'il agit ainsi et que la scène se reproduit quotidiennement. Le professeur regrette et déplore ses actes, puis une nouvelle élève sonne à la porte, perpétuant un cycle sans fin...