RIOT-Sarcey Michèle : Histoire du féminisme

A l'Internationale ouvrière de 1866, la question du travail des femmes est évoquée mais la majorité considère que la femme doit rester au domicile. Le clivage le plus important se dessine alors entre le féminisme et le socialisme, les premiers socialistes du début du siècle séparant l'émancipation individuelle de l'émancipation collective. La liberté de l'individu est assujettie à la libération du groupe dont il est membre. Pour les féministes, l'inégalité au sein de la famille est inséparable de l'inégalité sociale, économique et politique.

Le premier Congrès international du droit des femmes en 1878 concentre ses efforts sur l'amélioration de leur quotidien : le droit au travail, le développement de la formation professionnelle, l'accès à tous les métiers, l'égalité des salaires, la reconnaissance du travail ménager sont considérés comme des réformes nécessaires et immédiates. Le droit de vote est oublié.

Dès 1900, les clivages de classes se font jour. Les femmes travailleuses, ouvrières ou domestiques, sont peu sensibles au statut infériorisé de la femme mariée. Victimes de l'exploitation patronale, elles cherchent davantage à améliorer leur sort au quotidien ou, tout simplement, tentent d'échapper à la condition ouvrière.

La majorité des féministes, pour populariser leurs idées, acceptent de se conformer aux règles sociales qui définissent la féminité. Après une guerre particulièrement meurtrière, elles affirment que le premier devoir des femmes est d'avoir des enfants. Rares sont les femmes qui plaident en faveur de la dépénalisation de l'avortement. Elles approuvent ainsi une loi qui réprime les pratiques abortives (loi de 1920). La plupart des féministes défendent l'idée de la complémentarité des sexes, luttent pour la paix, la défense de la famille, pour de meilleures conditions de vie des ouvrières.

1938 : loi sur les droits civils de la femme mariée. L'incapacité de l'épouse est abolie. Elle est désormais capable d'ester en justice, de contracter, d'ouvrir un compte, de faire des études, de passer un examen, de demander un passeport, sans l'autorisation maritale. Cependant, le mari reste le chef de famille qui choisit le domicile conjugal et peut interdire à sa femme l'exercice d'un métier, mais son épouse peut éventuellement faire appel de ses décisions auprès des tribunaux. Seul, le mari exerce l'autorité parentale.

Le baby-boom a été accompagné par des mesures étatiques. A l'exception de la LFDF qui revendique le partage des tâches, y compris domestiques, et la réforme du Code civil, tous les mouvements de femmes sont partisans d'une politique nataliste. Ils mettent en avant la défense de la paix, la méthode dite d'accouchement sans-douleur, plus que la contraception ou l'avortement. Le combat pour l'égalité des sexes est comme effacé et les femmes cantonnées dans un espace conforme à leur " nature ".

1949 : Le Deuxième sexe de Simone de Beauvoir est publié : 22 000 exemplaires vendus dès la première semaine. Détonateur des mouvements féministes. La sexualité apparaît dans sa dimension libératrice. La prétendue " nature " féminine est en fait une construction sociale : " on ne naît pas femme, on le devient ".