Les uns avec les autres - De Singly

Publié par : Fiches

Fiche de lecture : Les uns avec les autres - De Singly La présence de cet essai de François de Singly dans le supplément bibliographique ajouté cette année à l’étude duthème des « réseaux sociaux » a de quoi surprendre : non seulement F. de Singly n’a jamais recours à ce qui pourraits’apparenter de près ou de loin à une « analyse de réseau » mais on pourrait encore davantage s’étonner de ce qu’iln’emploie jamais ce terme1, à une exception près, au cours des 272 pages qu’il consacre en réalité à la reformulationgénérale d’un problème qu’il estime assez mal posé dans le débat public


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C'est à la lumière de cette curiosité (pourquoi Les uns avec les autres fait-il parti de la bibliographie alors qu'il n'y est jamais question de réseau ?) que nous exposerons la thèse de F. de Singly selon laquelle la seconde modernité2 aurait inventé et suscité un nouveau type de lien social qui, loin d'atomiser la société en un rassemblement factuel d'individus seuls et isolés, ne pouvant se prévaloir d'aucun lien entre eux, leur permettrait au contraire de devenir réellement " individualisés "3, c'est-à-dire détachés de leurs appartenances traditionnelles et donc libres d'en (re)nouer de nouvelles plus largement propices à la révélation de l'" authenticité individuelle "4 et génératrices, finalement, de différenciation personnelle. C'est sans aucun doute parce que F. de Singly ne cesse de parler de lien (rappelons qu'il est aussi directeur du Centre de recherches sur les " Liens sociaux " au CNRS) qu'il figure dans la bibliographie. Mais là encore il faudrait souligner combien l'horizon intellectuel de F. de Singly est éloigné de celui d'une analyse de réseau " classique " : c'est moins la forme d'un éventuel réseau social " complet " qui l'intéresse que le contenu réel du lien qui unit désormais les individus " individualisés "5 entre eux (ce lien étant caractéristique, selon lui, de la seconde modernité).


Dans cet ouvrage, F. de Singly développe une thèse qui vise essentiellement à le distinguer des essayistes convaincus de l'existence d'une crise majeure du lien social (Alain Finkielkraut, analystes politiques, etc.) qui s'enracinerait dans la montée en puissance de l'individualisme. La crise du lien social se déclinerait alors en une multiplicité de crises : crise de la transmission, crise de la stabilité, crise des normes et enfin crise de la raison, qui constituent autant de chapitres jalonnant l'argumentation de F. de Singly. Plutôt que de succomber aux préoccupations alarmistes de quelques-uns, ce dernier nous invite à considérer l'individualisation non pas comme un facteur d'anomie mais bien plutôt comme le principe d'un lien social " idéal " puisqu'" électif ".


F. de Singly ne se défait jamais d'un " optimisme " (voire d'un " idéalisme ") sociologique revendiqué comme tel (le dernier chapitre du livre propose même une réflexion sur l'" idéal du lien social "). Sa volonté de souligner les dimensions " positives " de l'individualisme l'amène à le distinguer radicalement de l'égoïsme moral6 ou du désir de solitude. Plutôt que de considérer que le lien social serait en train de se déliter, F. de Singly montre au contraire qu'il est devenu essentiellement électif : il n'est plus contraint mais très largement désiré, le réseau personnel d'un individu devenant ainsi l'ensemble des liens sociaux dont il est le seul architecte volontaire, presque " zélé " (il y aurait une forte demande de relations avec un autrui choisi car ce dernier est perçu comme pouvant révéler l'identité profonde, ce qui représente un enjeu considérable pour l'individu moderne).


F. de Singly insiste donc ainsi sur le fait que les individus continuent malgré tout à participer à la vie sociale et à créer volontairement du lien social. Certes, celui-ci se révèle sans aucun doute moins solide et plus souple qu'auparavant (puisque que le " contrat " sur lequel se fonde une relation peut-être rompu à tout moment) mais cette caractéristique du lien social moderne est l'envers de l'une de ses dimensions les plus " positives ", celle de la liberté.


F. de Singly date la première modernité des débuts de la IIIème République jusqu'au milieu des années 1960 et nous aurions connus depuis lors une seconde modernité. " La première modernité peut être définie comme la période de l'émancipation, alors que la seconde est le temps de la différenciation personnelle " : ce propos est central dans la thèse de F. de Singly et opère comme principe distinctif des deux types de modernité.



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Informations
Date :

09/01/2013


Langue :

Français


Pages :

5


Consultations :

5184


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