Chagrin d'école de Daniel Pennac (Fiche de lecture)

Pennacchioni l'enseignant a reçu nombre d'appels de parents inquiets pour la réussite de leurs enfants. Il distinguait différents types parmi ces parents, de la mère désespérée à celle qui a toujours choisi ce qu'il y avait de mieux pour son enfant. Toutes " ignoraient qu'elles s'adressaient au plus jeune perceur de coffre de sa génération " (p. 55). À force d'entendre qu'ils sont bons à rien, les mauvais élèves, à l'instar de Pennacchioni enfant, intègrent l'idée qu'ils ne feront jamais rien de leur vie.

Pennac raconte l'histoire de Nathalie, une de ses élèves, qui lui disait : " j'ai douze ans et demi, et je n'ai rien fait. " (p. 65) L'adolescente avait entendu ces mots de la bouche de son père. " Les mauvais élèves (élèves réputés sans devenir) ne viennent jamais seuls à l'école " (p. 70), explique Pennac. Ils amènent en classe leurs problèmes, leurs colères ou leurs chagrins. Pour cette raison, il pense qu'il faudrait inventer le " présent d'incarnation " (p. 70) spécifiquement pour l'école, un temps qui signifie " je suis là ".

" À quoi tient la métamorphose du cancre en professeur ? " (p. 94), voilà la question qui interpelle Pennac. Force est de constater que ce sont des enseignants qui lui ont permis de se projeter positivement dans le futur. Autre facteur décisif dans sa mutation : l'amour. Ce sont là les éléments qui ont amené le petit Pennacchioni à devenir Monsieur Pennacchioni, et plus tard l'écrivain Pennac.

Pennac met en valeur l'exercice de la dictée s'il est réalisé dans des conditions visant à la compréhension de la langue et donc du texte. L'écrivain décrit ensuite en quoi l'apprentissage par coeur de textes est bénéfique puisqu'il permet de " s'immerger dans la langue " (p. 158). Pennac montre aussi comme cet exercice peut favoriser un climat d'entente et de complicité au sein de la classe, indépendamment du statut de bon ou mauvais élève.

L'écrivain a travaillé avec de nombreux étudiants en difficulté scolaire. Avec eux, il a été habitué à obtenir des réponses absurdes à ses questions. Pennac se demande alors " quoi faire ? ". Il ne propose pas une solution miracle, mais constate que condamner les réponses des élèves en les jugeant simplement fausses ne fait que les enfoncer dans leur sentiment de décrochage.

Le " faire exprès " est un reproche que l'école et/ou les parents adressent depuis longtemps aux mauvais élèves. Pennac, lui, s'attache surtout à analyser le " le " de " tu le fais exprès " pour convenir qu'il s'agit d' " un si petit pronom pour tant de solitude " (p. 201). Le sentiment d'exclusion est à nouveau en cause. Les mauvais élèves sont mis de côté parce qu'ils ne maitrisent pas les codes, de la langue par exemple. Pennac observe cela au travers du film L'Esquive. C'est un film de 2004 qui montre un groupe d'élèves de banlieue mettant en scène la pièce de Marivaux, Le Jeu de l'amour et du hasard.

L'écrivain constate aussi que les élèves qu'il a rencontrés lorsqu'il visitait des classes lui demandaient régulièrement pourquoi il employait dans ses romans un langage jugé cru. Pennac n'a en effet pas peur d'utiliser des mots que les jeunes prononcent chaque jour. Une fois écrits ou repris par un adulte ou un écrivain reconnu, ces mots impressionnent.