Antigone de Jean Anouilh (Fiche de lecture)

La première scène met en présence Antigone et sa nourrice, inquiète du comportement de sa petite préférée. La jeune fille rentre en fait au palais à l'aube après avoir enterré son frère, Polynice, malgré l'édit de son oncle, Créon, le roi de Thèbes, qui a promis la mort à quiconque enfreindrait la loi. Elle rassure sa nourrice en lui cachant la vérité. S'ensuit alors une scène entre Antigone et Ismène, sa soeur ainée, durant laquelle la rivalité entre les deux jeunes femmes apparait au grand jour même si le dialogue n'est pas dénué de tendresse. Antigone cache également à sa soeur son acte de la nuit, mais elle l'inquiète quand elle lui signifie qu'elle ira enterrer son frère contre l'avis royal.

Il lui propose d'abord d'étouffer l'affaire et de prétendre à un caprice d'enfant, mais Antigone lui rétorque qu'elle a agi en toute connaissance de cause et qu'elle recommencera si Créon la libère. Il lui prouve ensuite l'absurdité des rites religieux, mais elle lui répond qu'elle ne l'a fait que " pour elle ". Créon lui explique ensuite la difficulté de gouverner et les raisons politiques et sociales pour lesquelles il a été obligé d'éditer ce décret. Il lui demande de le comprendre. Mais Antigone refuse de l'écouter : " Je ne veux pas comprendre... Je suis là pour vous dire non et pour mourir ". Alors, Créon, comme ultime argument, lui dévoile la véritable histoire de ses deux frères indignes, " qui se sont égorgés comme deux petits voyous qu'ils étaient, pour un règlement de comptes... ". Antigone, cette fois, vacille en apprenant que Polynice n'était qu'" un petit fêtard imbécile, un petit carnassier dur et sans âme ", y compris à l'égard de son père, OEdipe, qu'Antigone vénérait. Créon, voulant assoir sa victoire, lui donne alors sa définition du bonheur. Mais, en entendant ce mot, Antigone réagit et redevient la petite fille rebelle qu'elle n'a jamais cessé d'être. Elle lacère le raisonnement de Créon : " Vous me dégoûtez tous avec votre bonheur ".

C'est à ce moment qu'arrive Ismène qui se propose de mourir avec sa soeur. Celle-ci refuse, prétextant qu'il est trop tard : " Tu ne te figures pas que tu vas mourir avec moi maintenant. Ce serait trop facile ". Cette réplique fait allusion au moment fort de leur première rencontre, alors qu'Ismène refusait de souffrir.

Créon doit alors subir les reproches du choeur, qu'il rejette : " C'est elle qui voulait mourir. Aucun de nous n'était assez fort pour la décider à vivre ". Il reste ensuite inflexible devant la tentative désespérée d'Hémon de sauver sa fiancée en se rangeant derrière le légalisme de sa fonction de roi : " Je suis le maitre avant la loi. Plus après ".

C'est le messager qui viendra annoncer l'effroyable nouvelle. Antigone, condamnée à être emmurée vivante afin qu'elle ne souille pas la ville de son sang, a préféré se pendre dans son tombeau avec sa ceinture. Arrivé trop tard, Hémon s'est jeté dans les bras sans vie de sa fiancée. Parvenu à son tour sur les lieux du drame, Créon tente de relever son fils qui ne l'entend plus. Hémon se redresse et lui crache au visage, puis " le regarde avec ses yeux d'enfant, lourds de mépris " avant de se plonger l'épée dans le ventre. Le messager annonce enfin la mort d'Eurydice, la femme de Créon, qui s'est tranché la gorge en silence quand elle a appris la mort de son fils. Créon reste donc seul, avec son petit page. Il va se rendre au conseil puisqu'il est le roi. Quant aux gardes, eux, " c'est pas leurs oignons, ils continuent à jouer aux cartes... ".

Son physique ingrat, de " moineau ", comme lui assène Créon, se double de gravité et de tristesse qui transparaissent à travers ses yeux et son sourire. La position foetale accentue encore son malaise physico-moral, caractéristique d'un isolement, d'un repli sur soi et d'un besoin de sécurité. Cette position foetale est un prélude à sa véritable naissance : elle la quittera pour " se dresser seule en face du monde ".

" le malheur humain, c'était trop peu ". Et de fait, Antigone avouera, à court d'arguments devant son oncle, que cet acte d'ensevelir son frère, elle ne l'a fait " pour personne ", sinon pour elle. Par cette affirmation, elle revendique dès lors sa liberté totale même si, face à la mort, elle prend conscience de sa solitude (" toute seule ") et de ses peurs (" je ne sais plus pourquoi je meurs. J'ai peur... "). La mort l'attire comme la conclusion sublime d'un idéal démesuré, mais, in fine, l'angoisse.