Performance financière : vers une relecture critique du résultat comptable

Publié par : Economist

Performance financière : vers une relecture critique du résultat comptable - Disponible sur l'archive ouverte pluridisciplinaire HAL.


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Empruntant au courant conventionnaliste ses méthodes et son axiomatique, cette étude tente ici de projeter sur le résultat comptable un éclairage renouvelé ; l'indicateur se dévoile alors pour apparaître non plus comme un solde fiable et objectif mais comme un reliquat dont la détermination est modelée par des mécanismes sociaux qui échappent à l'interprétation contractualise largement prédominante. L'analyse par les conventions nous invite ainsi à découvrir les dispositifs cognitifs qui guident le praticien dans la résolution de problèmes liés à la représentation comptable. Si elles le soustraient à l'incertitude de la modélisation, les conventions ne peuvent toutefois prétendre à la neutralité des solutions proposées. Résultat de tensions diverses, d'influences culturelles, idéologiques et politiques, elles orientent inévitablement l'utilisateur dans un schéma de pensée très orienté. Le bénéfice net apparaît alors moins comme la performance dégagée par les activités marchandes de la firme que la variation de la richesse de ses propriétaires, destinataires implicites du modèle. Animés par le seul intérêt scientifique, ces travaux ont cherché à montrer que tout dispositif de mesure est indissociable de son contexte social. A cet égard, la propriété privée, méta convention qui régente le rapport que l'être entretient avec les objets conditionne inévitablement la façon dont la performance est évaluée. En accordant la légitimité souveraine (que cet article ne conteste pas) aux détenteurs des droits de propriété, nous acceptons leur créance résiduelle comme mesure finale du profit de la firme et partant comme indicateur privilégié de son efficacité. Il semble pourtant que cette acceptation s'est dissipée dans l'esprit des convenants pour se transformer peu à peu en une vérité qu'on ne songe même pas à discuter. Au demeurant, c'est bien là le propre d'une convention que de guider l'individu dans la résolution d'un problème jusqu'à faire disparaître le problème lui-même, de sorte qu'aucune question ne se pose et que la voie à suivre s'ordonne comme une évidence.


La mesure de la performance revêt une dimension essentielle au sein de toute organisation dont l'existence dépend de l'efficience. Le concept est cependant loin d'être unidimensionnel ; il existe autant d'approches de la performance que de parties prenantes : performances économique, technique, humaine, environnementale, citoyenne, éthique... Chacun la construit en fonction des objectifs qu'il assigne à l'organisation. Pour notre part, nous avons choisi de consacrer cet article à sa dimension financière. La comptabilité en tant que système de mesure nous en fournit plusieurs indicateurs dont le plus connu et le plus exposé du fait de sa position centrale est le résultat net comptable. Ce solde final, compte tenu des enjeux managériaux qu'il implique, fait l'objet de toutes les attentions lors des assemblées générales mais aussi des publications financières. Son influence est telle que nombre de décisions majeures dépendent de son montant constaté ou attendu : embauches ou licenciements, investissement ou abandon d'activité, restructuration, acquisition, fusion ... La fébrilité des opérateurs sur les marchés et la variation des cours boursiers qui font suite aux communications relatives au résultat témoignent de l'importance qu'on lui accorde. Le fait peut surprendre mais fort peu d'observateurs ou commentateurs économiques s'interrogent réellement sur la nature même de l'indicateur. Si ses fondements, sa construction et sa capacité à traduire la performance financière de l'entité ont maintes fois fait l'objet d'études scientifiques, ces dernières n'ont guère ébranlé malgré leur portée le statut du résultat net : celui-ci reste la mesure phare en matière de performance financière dégagée par l'entreprise. En empruntant au courant conventionnaliste ses méthodes et son axiomatique, cet article entend mener alors une réflexion à la fois critique et hétérodoxe sur les soubassements conceptuels de la mesure comptable : le résultat de la firme est-il déterminé selon des règles qui s'imposent du fait même de leur pertinence et de leur justesse ou bien est-il " modelé " par des choix qui tendent à privilégier un point de vue particulier ?


Si la modélisation comptable consiste à produire la représentation chiffrée d'une entité économique, aucune solution ne s'impose dans l'absolu comme préférable à une autre. Aussi, devant la multiplicité des choix, le praticien serait en proie à l'incertitude s'il n'avait recours à un ensemble d'accords collectifs et reconnus. L'idée peut surprendre tant les automatismes qui l'animent sont nombreux et prégnants. Pourtant la situation deviendrait rapidement embarrassante s'il n'était fait appel à un cadre normalisé indiquant la solution attendue. De manière assez schématique nous pouvons recenser quatre sources principales d'incertitude.


1. La délimitation du champ d'observation. Sans l'intervention des conventions comptables, une première série de questions s'imposerait inévitablement : de qui tient-on la comptabilité ? Où commence l'entreprise, où s'arrête-t-elle ? Quand doit-on arrêter les comptes ? Quels événements relèvent de l'observation comptable ? Quels sont ceux qui en sont exclus et pourquoi ? Comment juger si une dépense est une charge ou une affectation du résultat ? Etc.


2. Le langage monétaire. Une seconde série de questions relatives à la façon de traduire et communiquer les flux repérés dans le champ d'observation pourrait tout autant nous plonger dans l'incertitude. Comment mesurer les flux qui naissent de l'activité ? Comment donner une expression monétaire à certains événements non marchands ? Etc.


3. La procédure. Après avoir repéré le champ d'observation et la symbolique, le questionnement s'oriente vers la procédure à suivre : comment effectuer la saisie des informations sélectionnées (le mécanisme de la partie double n'est pas unique) ? Comment orienter les comptes ? Quels sont les documents obligatoires ? Quelle présentation adopter ?


Cette liste est loin d'être exhaustive et bien d'autres sources d'incertitude seraient à même de bloquer son comportement en plongeant le comptable dans la confusion et l'irrésolution. Comment surmonte-t-il alors cette situation ? Peut-on lui prêter une autonomie de décision qui soit telle qu'il choisisse de façon isolée les règles idoines ? Quand bien même serait-il doté d'une rationalité parfaite, peut-on imaginer un seul instant que ses normes de références seront universellement partagées et acceptées ?



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Date :

03/02/2011


Langue :

Français


Pages :

19


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5236


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Auteur : Marc Amblard


Tags : Article de recherche, Finance & Compta
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