Les mains sales de Jean-Paul Sartre (Fiche de lecture)

Slick et Georges reprochent à Hugo d'être un " gosse de riche ", un intellectuel qui n'a jamais eu faim, tandis qu'eux sont entrés au parti non pour défendre le droit de chacun au respect, mais pour échapper à la misère. Hoederer finit par leur faire accepter l'idée qu'ils peuvent avoir confiance en Hugo. Ils ne fouillent donc pas sa chambre. Proposant de rendre la confiance par la confiance, Jessica les prie de le faire, mais les gardes ne trouvent rien.

Le Prince Paul et Karsky se sont alliés car ils ont pour intérêt commun l'unité nationale et la sauvegarde de l'indépendance du territoire. Malgré leurs divergences d'opinion en matière de politique extérieure, ils se sont trouvés d'accord sur la nécessité pour l'Illyrie de se présenter unie aux yeux de l'étranger : les divisions intestines en Illyrie sont en effet un obstacle à la paix de demain. Ils désirent réaliser une union nationale qui trouvera son cadre dans les organisations clandestines qui existent déjà. À cette fin, Karsky et le prince Paul souhaitent que le Parti se joigne au Comité National Clandestin. Le Parti disposerait de deux votes, le Régent de six et le Pentagone de quatre. La proposition est jugée inacceptable par Hoederer qui exige un comité directeur réduit à six membres avec trois voix pour le Parti. Hugo s'indigne violemment contre cet accord regroupant les défenseurs des revendications légitimes des travailleurs (le Parti) et les représentants du paysannat et de la bourgeoisie. Au moment où il met la main sur son revolver, une violente détonation se fait entendre.

Hugo reproche à Hoederer de faire de l'organisation révolutionnaire un parti de gouvernement. Hoederer explique la nécessité d'accepter cet accord. Une fois l'Armée rouge arrivée en Illyrie, le Parti aura des difficultés à garder le pouvoir : " (...) toutes les armées en guerre, libératrices ou non, se ressemblent : elles vivent sur le pays occupé. Nos paysans détesteront les Russes, c'est fatal, comment veux-tu qu'ils nous aiment, nous que les Russes auront imposés ? " (p. 188). De plus, une fois au pouvoir, le Parti devra prendre des mesures impopulaires pour redresser le pays en ruine. En formant un gouvernement avec les libéraux et les conservateurs, en réalisant l'union nationale, le Parti restera une minorité et fera de l'opposition à l'intérieur du gouvernement.

Olga apprend à Hugo que le Parti a constitué un comité clandestin avec le gouvernement et les gens du Pentagone tout comme le voulait Hoederer. Le Parti a réhabilité la mémoire de ce dernier et a menti sur la volonté que ses membres avaient de l'assassiner. Hugo refuse de réintégrer le Parti, qui a repris les idées d'Hoederer, avec lesquelles il n'a jamais été d'accord. C'est pourquoi, il revendique son crime. S'il le reniait, Hoederer serait mort par hasard. Hugo choisit la mort à sa récupération par le Parti.

Présentée comme la protectrice d'Hugo, elle est tout comme lui membre du Parti. Bien qu'elle soit une femme, elle possède des traits de caractère masculins. Elle apparait dès lors comme un personnage déterminé et sévère (c'est une femme de tête), mais empreint de sentiments. Elle met tout en oeuvre pour sauver Hugo ; sa conscience politique est mêlée à une conscience maternelle. Jalouse de Jessica, Olga la considère comme un élément indésirable qui risque d'influencer négativement la pensée politique d'Hugo, mais aussi de le mettre en danger dans sa mission. Elle juge Jessica bourgeoise et totalement ignorante en matière de politique.

Enfant gâté, ce statut lui donne soif de justice sociale ; c'est pourquoi, il entre au Parti. Il y devient journaliste, mais aspire à d'avantage d'action. Hugo est mal intégré au sein du Parti. Ses origines bourgeoises attisent l'hostilité de ses membres qui ne croient pas en la sympathie d'Hugo envers le peuple ; ils pensent qu'il a juste envie de soulager sa conscience. En réalité, en entrant au Parti, Hugo était à la recherche de vérité et d'authenticité, il tentait d'échapper à l'atmosphère mensongère de son milieu bourgeois. Mais, malgré son indignation sincèrement communiste, il a mal accompli la mission que lui avait confiée Louis et est revenu de manière peu glorieuse, après ses deux années de détention, dans les locaux du Parti pour se remettre à ses exécuteurs sans parvenir à justifier rationnellement son choix de mourir. Son caractère candide et ingénu hérité de la bourgeoisie lui a fait manquer sa vie, son acte et sa mort.

Une comparaison est à faire entre le personnage d'Hugo Barine et de Jean-Paul Sartre lui-même. Leur point commun est la " bâtardise " (qui procède de deux origines différentes). Cette impression de bâtardise chez Sartre est double. Elle est d'une part affective et organique : la mort de son père alors qu'il n'avait que deux ans a suscité chez lui l'impression que les sentiments avec lesquels son grand-père le recueillait étaient surjoués. D'autre part, sa bâtardise est intellectuelle, culturelle et sociale : Sartre a des affinités avec l'est, mais est né du côté de l'ouest : " je ressens personnellement profondément la contradiction entre ces deux cultures et je suis fait de ces contradictions. Mes sympathies vont indéniablement au bloc de l'Est, mais je suis né et j'ai été élevé dans une famille bourgeoise et une culture bourgeoise ".