Antigone de Sophocle (Fiche de lecture)

La pièce commence le lendemain de la mort d'Étéocle et Polynice, les deux fils d'OEdipe, qui se sont entretués pour la prise de pouvoir de la ville de Thèbes. Antigone annonce à sa soeur Ismène l'interdiction d'ensevelir le corps de Polynice, leur frère, proclamée par Créon, son oncle, dès lors roi de Thèbes, ainsi que sa résolution à ne pas s'y soumettre, au péril de sa vie.

Le choeur fait le récit du combat mortel dont Thèbes sort triomphante. Depuis l'exil de leur père (dont Sophocle fait le récit dans OEdipe à Colone), Étéocle et Polynice avaient convenu de se partager équitablement le trône : en gouvernant alternativement d'année en année, ils tenteraient ainsi d'échapper à la malédiction lancée sur eux par OEdipe, qui les condamnait à un fratricide réciproque. Pourtant, le moment venu, Étéocle refuse de céder sa place à son frère : celui-ci lève alors une armée de sept chefs contre Thèbes (Eschyle en fait le sujet de sa pièce Les Sept contre Thèbes, 467 av. J.-C.) qui, à l'exception d'un seul, trouveront la mort au combat, en même temps que les deux frères, " auteurs et victimes à la fois d'un fratricide sacrilège " (v. 170).

Créon, proclamé roi de la ville de Thèbes, pose le principe sur lequel il compte appuyer son pouvoir : la supériorité de l'amour de la patrie sur toute autre considération, justifiant ainsi son interdiction d'ensevelir le corps du traitre Polynice qui a attaqué la ville tandis qu'à Étéocle seront rendus les hommages les plus fastueux. Alors qu'un garde annonce la découverte du corps de Polynice mystérieusement recouvert de poussière, Créon ordonne l'arrestation du coupable sous peine d'un terrible châtiment.

Antigone est arrêtée alors qu'elle recouvrait à nouveau de terre le corps de son frère que les gardes avaient nettoyé pour le remettre à nu : prise sur le fait, gémissante et furieuse, elle avoue sans le moindre tremblement. Intraitable, elle s'oppose fièrement à Créon, défendant la justice divine et l'application des rites contre l'interdiction arbitraire et immorale du nouveau roi. Elle refuse le soutien de sa soeur Ismène qui tente de s'associer à son geste : elle lui sauve ainsi la vie. On apprend par Ismène qu'Antigone est promise à Hémon, fils de Créon.

Hémon entre en scène : en apparence soumis à la volonté paternelle, il tente pourtant d'infléchir la décision du roi, lui faisant entendre l'opposition de la ville à la mise à mort d'Antigone. Alors que Créon demeure sourd aux gémissements de Thèbes sur le sort de la malheureuse, la dissension entre père et fils devient de plus en plus évidente, jusqu'à l'affrontement direct : Hémon se lance dans un plaidoyer virulent contre l'obstination de Créon, son aveuglement et son implacable tyrannie donnant prétexte à une réflexion sur l'essence de la démocratie.

Tirésias, le devin aveugle, vient enjoindre Créon à la clémence : la dépouille de Polynice souille la ville et annonce la colère divine. Accusant d'abord Tirésias de mensonge ou de desseins crapuleux, Créon finit par céder après un échange houleux : sous le poids de la menace d'une contagion généralisée, il consent à libérer Antigone et à enterrer le corps de Polynice après lui avoir rendu les derniers hommages, reconnaissant enfin " que le mieux [est] pour l'homme d'observer les lois établies jusqu'au dernier jour de son existence " (v. 1111-1113).

Un messager rapporte au choeur et à Eurydice, femme de Créon et mère d'Hémon, les ultimes atrocités du destin : Antigone s'est pendue, provoquant les plaintes désespérées d'Hémon. Arrivé dans le tombeau à ce moment-là, Créon voit son fils se tuer sous ses yeux après que celui-ci lui ait craché à la figure. À ce récit, Eurydice se retire, silencieuse.