Le rapport de Brodeck de Philippe Claudel (Fiche de lecture)

Le lendemain du drame, Brodeck commence à recueillir des informations afin de pouvoir commencer la rédaction de son rapport : l'Anderer est arrivé au village un jour de mai, vêtu avec une recherche déplacée pour un tel lieu et accompagné de son cheval et de son âne, mademoiselle Julie et monsieur Socrate. Immédiatement, cet homme a inspiré la méfiance et la peur des villageois. Depuis la fin de la guerre, personne n'était venu au village.

Son travail de collecte replonge Brodeck dans ses souvenirs. Il a rencontré Emélia alors qu'il faisait ses études dans la ville de S., études qu'il s'est vu obligé d'interrompre en raison de la guerre. Il a passé de nombreux mois dans un camp où, chaque jour, pour répondre aux désirs de la femme du directeur, un homme était choisi au hasard pour être pendu en public. Il a vécu la peur au ventre, incertain de sa survie.

Brodeck comprend que tous les hommes s'étaient donné rendez-vous le soir du meurtre et il se demande pourquoi lui-même n'avait pas été convié. En réalité, depuis son retour du camp, il fait peur, d'une part parce qu'il a survécu à l'enfer, d'autre part parce qu'il n'est plus comme les autres du fait de son horrible expérience.

À nouveau, Brodeck replonge dans ses souvenirs. C'est grâce aux habitants du village qu'il a pu aller faire ses études à S. À l'époque, tous se sont cotisés : ils voulaient un instruit parmi eux et c'était Brodeck qui présentait les meilleures capacités. Au début, il était effrayé par la ville, mais rapidement, il s'est habitué à sa nouvelle vie et il a rencontré Emélia, dont il est tombé amoureux. Cependant, bien vite, des rumeurs de rassemblements de troupes à la frontière est ont enflé et des manifestations ont eu lieu, auxquelles Brodeck n'a pas pris part. Une nuit, il y a eu une émeute : les boutiques appartenant à des " fremdër " (qu'on peut traduire par " étrangers " ou " traitres ", " ordures ") ont été saccagées. Brodeck a assisté, impuissant et révolté, à l'assassinat d'un vieil homme. Brodeck s'est alors rendu chez Emélia, lui a demandé sa main et tous les deux ont fui la ville pour se réfugier au village.

Peu de temps après avoir commencé l'écriture de son rapport, Brodeck se rend compte que quelqu'un est entré dans la resserre, la pièce où il s'enferme pour taper à la machine. Cette personne a tout mis sans dessus dessous, mais n'a pas trouvé les documents. C'est à cette occasion que Brodeck découvre une lettre écrite à son attention par Diodème. Ce dernier était l'instituteur du village et un ami de Brodeck. Il est mort quelques semaines plus tôt, dans d'étranges circonstances, et Brodeck a hérité de son bureau. La lettre découverte est une confession: Diodème y explique pourquoi Brodeck a été arrêté et conduit dans un camp.

Quelques temps après le début de la guerre, une troupe s'est installée dans le village sous le commandement du chef d'escadron Buller. Les débuts de la cohabitation entre les habitants et l'armée ont été très durs. La lettre-confession de Diodème apprend à Brodeck que l'instituteur a été convoqué, en même temps que le maire, par Buller qui leur a demandé de " purifier " le village. C'est pourquoi Brodeck et Simon Fripman, les seuls étrangers du village (ils n'y étaient pas nés), ont été arrêtés. Brodeck comprend enfin pourquoi Diodème a mis tant de ferveur à s'occuper de Fédorine et d'Emélia pendant son absence.

La troupe est restée dix mois au village et, finalement, Göbbler a réussi à convaincre les villageois que cette occupation avait du bon pour l'économie. Un jour, trois jeunes filles visiblement en fuite ont été découvertes dans la forêt et ont été menées aux soldats qui les ont maltraitées. Emélia, qui avait pris leur défense, a été enfermée avec elles. Le lendemain, Fédorine a retrouvé les trois jeunes filles mortes : elles avaient été violées et torturées par les soldats, mais aussi par des villageois. Seule Emélia en a réchappé, mais cette épreuve lui a fait perdre l'esprit. Elle s'est alors enfermée dans un mutisme dont même le retour de son mari n'est pas parvenu pas à la faire sortir. Du viol dont elle a été victime est née Poupchette que Brodeck a reconnu comme sa fille et qu'il aime profondément.