L'existentialisme est un humanisme de Sartre (Fiche de lecture)

Publié par : lePetitLitteraire.fr

Fiche de lecture L'existentialisme est un humanisme de Sartre. Il en est de même devant tout choix : l'angoisse est la crainte des possibilités, de ce qu'on pourrait faire, de sa liberté (puisque toute possibilité est contingente et, dans le délaissement, permise) et de sa responsabilité face au choix. Néanmoins, l'angoisse n'est pas un obstacle à l'action (voir III-2), elle est inévitable en tant qu'elle accompagne toute conscience de responsabilité.


Consulter un extrait ci-dessous

Sartre expose les principaux reproches faits à l'existentialisme. Pour les communistes, c'est une philosophie bourgeoise de l'action impossible ; pour les catholiques, c'est un pessimisme qui nie l'importance des efforts humains en supprimant les valeurs divines ; tous accusent l'existentialisme de manquer à la solidarité humaine par un subjectivisme isolant l'individu. Les gens trouvent l'existentialisme triste et laid, même si leur propre " sagesse des nations " (24) semble tout aussi déprimante.


Pour l'existentialisme athée, l'existence précède l'essence. On trouvait jusqu'ici chez les philosophes l'idée que l'homme (tel que conçu par Dieu ou non) est déterminé par une nature humaine, comme un objet manufacturé dont l'essence précède l'existence (son utilité, la méthode de production et tout ce qui permet de le définir précède et conditionne sa fabrication). Mais pour Sartre, " l'homme surgit dans le monde, et [...] se définit après " (29) ; il n'y a pas de nature humaine, l'homme devient tel qu'il se fait, et même tel qu'il se veut.


L'homme est un projet, il est responsable de lui-même, ce dont l'existentialisme veut le rendre conscient. L'existentialisme part d'une double subjectivité, individuelle et humaine : en choisissant et en agissant individuellement en vue de devenir ce qu'on veut être, on fait de soi un projet qu'on estime valable pour tout le monde, car ce qu'on considère être le bon choix pour soi reflète une image de l'homme tel qu'on pense qu'il doit être. La conscience d'une telle responsabilité pour soi et pour les autres, lors d'un choix où l'homme ne sait pas à quelles valeurs se raccrocher (ne vaut que ce qui est finalement choisi, seulement parce qu'il l'a été), provoque l'angoisse.


Face à la non-existence de Dieu, l'homme est dans une position de délaissement (notion existentialiste allant de pair avec l'angoisse), et il s'agit d'en tirer les conséquences : ce qui est bien n'est plus écrit nulle part ni déterminable a priori. L'homme est livré à lui-même, " condamné à être libre " (39) : il est donc entièrement responsable, autant de ses passions que de son interprétation du monde. Dans un choix aussi cornélien que celui d'un étudiant tiraillé entre rester près de sa mère ou l'abandonner à son désespoir pour s'engager dans la Résistance afin de venger son frère et aider son pays, on a affaire à deux morales : l'aide individuelle et immédiate, et l'action à grande échelle, plus ambiguë (qui peut prédire s'il y jouera un rôle important ou insignifiant ?). Aucune doctrine fixe ne peut résoudre ce dilemme. Choisir selon son sentiment est également illusoire, puisque décider que l'on accorde finalement plus de valeur à sa mère qu'à son pays ne peut se justifier que par l'acte même de rester auprès d'elle, pas par le fait de l'envisager. De même, choisir quelqu'un pour nous conseiller, c'est déjà décider de la réponse qu'on souhaite entendre.


Pour agir, l'homme doit se limiter à prendre en compte les probabilités qui concernent directement son action et la rendent possible. Si l'on rejoint la cause marxiste, cela impliquerait normalement de parier, entre autres, sur un parti bien unifié et sur des camarades prêts à s'engager jusqu'au bout ; mais cela peut très bien ne pas être le cas puisque ceux-ci sont libres. Cependant, la probabilité qu'un parti international soit unifié ou non ne doit pas entrer en ligne de compte, car elle ne dépend pas de la volonté de celui qui le rejoint. Il faut agir sans espoir, ne pas se faire d'illusions mais ne pas renoncer pour autant, faire tout son possible : l'existentialisme est une morale d'engagement. Les reproches de quiétisme (privilégiement de la contemplation au détriment de l'action) sont donc infondés : au contraire, l'existentialisme considère que l'homme n'est que par son action, en dehors il n'est rien. Justifier ses rêves perdus en pensant qu'on avait le potentiel pour les réaliser mais que les circonstances étaient contraires est refusé. Les protagonistes des romans de Sartre font horreur parce qu'ils sont non seulement présentés comme lâches ou mauvais, mais coupables de l'être par leurs actions, par leurs choix. " Ce que les gens veulent, c'est qu'on naisse lâche ou héros "


L'existentialisme fait du cogito ( je pense donc je suis) de Descartes la seule vérité absolue : la conscience se trouve elle-même, constate qu'elle existe, par le fait même de penser. Cependant, dans l'existentialisme, on ne se découvre pas seulement soi-même par le cogito, mais on découvre également autrui : " l'autre est aussi certain pour nous que nous-mêmes. " (59) L'autre est de surcroit la condition de notre existence au sens où on ne peut se définir (par exemple comme étant méchant, spirituel) que par rapport à la façon dont il nous voit.


S'il n'y a pas de nature humaine, l'homme a cependant une universalité (être dans le monde, être mortel, être libre, etc.) qu'on appelle sa condition, et qui le définit à la fois objectivement puisque c'est universel et subjectivement puisque cette universalité n'est rien s'il ne se détermine pas par rapport à elle. Et c'est en situation, c'est-à-dire dans un contexte socio-historique précis, que l'homme se détermine par rapport à l'universalité de la condition humaine ; il le fait dans une multitude de projets individuels mais jamais entièrement étrangers car se basant toujours sur les mêmes caractéristiques universelles de l'homme, dont la liberté (qui permet de se définir par des choix). Choisir est un absolu, un élément de la condition humaine, et chaque choix sera dès lors compréhensible par quiconque à n'importe quelle époque, sans pour autant perdre de sa relativité due à la situation concrète dans laquelle il est fait.



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Date :

02/11/2011


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Français


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14


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Auteur : Vincent Guillaume


Editeur : Primento Editions


Tags : Bac de français, analyse littéraire, fiche de lecture, méthodologie, L'existentialisme est un humanisme de Sartre
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