Le statut de la magistrature

Publié par : Sparta

Ce dossier est ensuite examiné par la commission d'avancement qui décide de l'intégration. Les candidats déclarés admis rejoignent l'Ecole nationale de la magistrature où ils suivent une scolarité quasiment égale à  celles des autres auditeurs de justice


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LE STATUT DE LA MAGISTRATURE
Par Vincent Vigneau, professeur associé
du 22 décembre 1958 plusieurs fois remaniée.
Les magistrats composent un corps unique qui distingue deux types de
fonctions : les magistrats du siège, ou magistrature assise, qui comprend
les juges chargés de juger, et les magistrats du parquet, ou magistrature
debout, qui comprend les procureurs chargés de poursuivre.
Chapitre 1. Le recrutement des magistrats
de la magistrature. Mais, depuis quelques années, et en grande partie
de nouveaux types de concours et en développant le recrutement sur
Section I. Le recrutement par concours
magistrature
la magistrature, établissement public situé à Bordeaux, créé en 1970 et
écoles de la fonction publique, par voie de concours national.
a) le premier concours, dit concours étudiant, est réservé aux
étudiants âgés de moins de 27 ans au premier janvier de
b) le deuxième concours, dit concours fonctionnaire, est réservé
de la fonction publique hospitalière, âgés de 46 ans au plus au
service public.
c) le troisième concours est réservé aux personnes âgées de 40
collectivité territoriale, ou de fonctions juridictionnelles à titre non
professionnel.
il faut être titulaire de la nationalité française, être de bonne moralité,
jouir de ses droits civiques, être en situation régulière au regard du
service national et physiquement apte.
suivent une scolarité rémunérée qui dure 31 mois. Après avoir prêté
et dans diverses administrations (administration pénitentiaire, police,
gendarmerie, protection judiciaire de la jeunesse). La loi du 5 mars 2007
appartiennent néanmoins déjà au corps judiciaire, prêtent serment et
perçoivent un traitement. Pendant leur période de stage, ils participent à
cependant rendre de décisions. Ils peuvent toutefois, par exemple, non
seulement assister, mais également participer avec voix consultative aux
délibérés de la juridiction, présenter devant celle-ci des réquisitions ou
procéder à des interrogatoires.
aptes sont nommés magistrats du second grade selon les formes
prévues pour les autres magistrats et choisissent leur poste en fonction
de leur rang de classement. La loi du 5 mars 2007 a conféré la
Il peut aussi écarter un auditeur de certaines fonctions pour sa première
nomination.
exceptionnel et destiné à pourvoir momentanément des besoins
importants de magistrats.
Ainsi, des concours exceptionnels ont eu lieu en 1980, 1981, 1994 et
La loi organique du 25 juin 2001 a pérennisé ce type de recrutement en
qualité de magistrat du second et du premier grade, sans passer par le
dans le domaine juridique, administratif, économique et social, les
qualifiant particulièrement pour exercer des fonctions judiciaires, pour les
de 15 années professionnelles qualifiantes.
Les candidats admis suivent un stage probatoire (depuis la loi du 5 mars
formation théorique.
Section II. Le recrutement sur titre
magistrature) :
Ce mode de recrutement est destiné à des candidats ayant dépassé
être âgé de 27 à 40 ans au plus,
ou économique ou être docteur en droit et posséder un
2ème doctorat), ou être al ocataire d'enseignement et de
recherche en droit ayant exercé cette fonction pendant trois
Les candidats déposent un dossier de candidature à retirer auprès du
comprend leur curriculum vitae, est joint des attestations de magistrats et
du procureur général. Ce dossier est ensuite examiné par la commission
quasiment égale à celles des autres auditeurs de justice.
recrutée sur titre au 1/3.
Sous-section 2. Intégration directe dans le corps judiciaire (articles
22, 23 et 24 du statut de la magistrature)
tardé à se développer, certainement en partie en raison des réticences
attachés à la voie du concours, mode de recrutement impartial et
égalitaire.
postes de base par des magistrats plus âgés sans obérer la pyramide
des ages du corps judiciaire.
Pour pouvoir être intégré directement sur titre dans la magistrature, il faut
remplir les conditions suivantes :
avoir au moins 35 ans,
baccalauréat,
au deuxième grade),
2007, obligatoirement soumis à un stage probatoire de 6 mois en
juridiction (avant cette loi, ce stage était facultatif).
Sous-section 3. Magistrats en service extraordinaire
On désigne ainsi des personnes qui sont intégrées directement au corps
de la magistrature pour exercer des fonctions judiciaires pendant une
durée limitée.
peuvent être intégrées, soit pour une durée de 8 ans, non renouvelable,
pour une durée de 10 ans, non renouvelable en qualité de conseil er de
Ces recrutements sont opérés soit directement par le Conseil supérieur
de la magistrature pour les magistrats à la Cour de cassation, soit par la
Sous-section 4. Magistrats exerçant à titre temporaire (article 41 -10
du statut de la magistrature)
janvier 1995 qui consiste à recruter, pour une durée de 7 ans non
renouvelable, des professionnels qualifiés pour exercer des fonctions
Pour être nommé, il faut remplir les conditions suivantes :
être âgé de moins de 65 ans,
contrepartie, ils sont autorisés à continuer à exercer parallèlement une
activité professionnelle.
Préalablement à leur nomination, les candidats suivent une formation de
40 à 90 jours sur une période de 6 mois.
Sous-section 5. Détachement dans le corps judiciaire (articles 41 et
suivants du statut de la magistrature)
temporairement des fonctions judiciaire.
Pour pouvoir être placé dans cette situation administrative, il faut remplir
les conditions suivantes :
hospitaliers et aux fonctionnaires des assemblées
parlementaires appartenant à des corps et cadres d'emplois
de même niveau de recrutement.
justifier de 4 années de services (nomination au deuxième
grade),
justifier de 10 années de services (nomination au 1er
période de formation non probatoire de 6 mois.
Le détachement est prononcé pour une période de 5 ans non
Section III. Nomination et affectation
Les nouveaux magistrats sont nommés par décret du Président de la
République sur proposition du Garde des Sceaux. En fonction des
postes disponibles, ils sont affectés indifféremment au siège ou au
parquet.
deux ultimes formalités sont encore nécessaires : la prestation de
a) La prestation de serment
Tout magistrat, nommé à son premier poste, doit prêter serment
fonctions, de garder le secret des délibérations et de se conduire
en tout comme un digne et loyal magistrat ». Il ne peut, eu aucun
cas, être relevé de son serment.
Ce rite a pour objet de présenter publiquement le magistrat à ses
nouveaux collègues, aux fonctionnaires du greffe, aux membres du
barreau et au public.
des libertés fondamentales qui en fait une des composantes essentielles
du droit au procès équitable (Toute personne a droit à ce que s cause
soit entendue équitablement, publiquement, et dans un délai
raisonnable, par un tribunal indépendant et impartial, établi par la loi,
Il est donc nécessaire que les conditions de leur nomination et de leur
déroulement de carrière garantissent leur indépendance. On pourrait
craindre, en effet, que le pouvoir politique, qui dispose du pouvoir de
nomination, use de ses prérogatives en la matière pour faire pression ou
soient favorables.
particulières destinées à les protéger des pressions extérieures et qui
publique : elles portent essentiellement sur leur inamovibilité et le
déroulement de leur carrière.
pression, qui pourrait consister à le menacer de le déplacer.
règles de droit. Seules les voies de recours sont là pour corriger ou
modifier leurs décisions.
Cette liberté de jugement les distingue des magistrats du parquet qui
sont hiérarchisés et placés sous la subordination du Garde des Sceaux.
Pour éviter que le pouvoir politique ne puisse déplacer un juge qui ne
rendrait pas des décisions qui lui soient favorables, les magistrats du
peut recevoir, sans son consentement, une affectation nouvelle, même
en avancement ».
Il convient de préciser que si les magistrats du parquet ne bénéficient
pas, en droit, de la même garantie, dans les faits, ils jouissent également
Section II. La carrière des magistrats
Pour éviter que le pouvoir exécutif ne soit tenté de nommer des
favorise la carrière de ceux qui lui seraient proches, le statut de la
magistrature confie une part importante de la gestion des carrières à un
organe différent du gouvernement, le Conseil supérieur de la
magistrature. Il prévoit aussi des garanties pour assurer leur
déroulement de carrière.
Sous-section 1. Le Conseil supérieur de la magistrature et la
nomination des magistrats
Le Conseil supérieur de la magistrature a été profondément réformé
952 du 27 juil et 1993 modifiant notamment le titre VIII de la Constitution
affaiblissant les syndicats par une procédure électorale adaptée.
Après avoir décrit sa composition, nous en étudierons les attributions en
matière de nomination des magistrats.
I. La composition du Conseil supérieur de la magistrature
parquet.
composée de douze membres : le Président de la République, le Garde
des Sceaux (ministre de la justice), un magistrat du siège hors hiérarchie
de la Cour de cassation élu par ses pairs, un premier président de cour
tribunal de grande instance élu par les présidents de TGI, les présidents
deux magistrats du siège élus par leurs pairs au suffrage universel
indirect, au scrutin proportionnel à un tour et à deux degrés, dans le
désignées par le Président de la République, les présidents de
composée de la façon suivante : le Président de la République, le Garde
des Sceaux (ministre de la justice), un magistrat du parquet hors
hiérarchie à la Cour de cassation élu par ses pairs, un procureur général
près un tribunal de grande instance élu par ses pairs, deux magistrats du
parquet élus par leurs pairs au suffrage universel indirect à deux tours
(Avant la réforme de 1993 le CSM était composé du Président de la
République, du ministre de la justice, et de neuf membres nommés par le
Président de la République : trois magistrats membres de la Cour de
Cassation dont un avocat général, trois magistrats du siège, un
conseil er d'Etat, deux personnalités compétentes. Les six magistrats
étaient choisis sur une liste établie par le bureau de la Cour de
cassation, comprenant pour chaque catégorie, un nombre triple du
nombre de postes à pourvoir. Le conseil er d'Etat était choisi sur une liste
de trois noms établie par l'assemblée générale du Conseil d'Etat).
Le mandat des membres désignés est de quatre ans, non renouvelable
immédiatement.
Aucun membre, pendant la durée des fonctions, ne peut exercer ni la
mandat électif. Les membres du CSM sont sur leur demande et de droit
Les membres du CSM touchent une indemnité de fonctions et une
indemnité de déplacement. Ils sont tenus au secret professionnel, ainsi
que toutes les personnes qui assistent aux délibérations.
Le secrétariat administratif du CSM est assuré par un magistrat ayant
sept ans de services effectifs, nommé par décret du Président de la
République, pour un mandat de quatre ans renouvelable une fois. Il peut
être assisté par un ou plusieurs adjoints désignés dans les mêmes
conditions. Le secrétaire administratif est placé en position de
détachement et ne peut exercer aucune autre fonction.
(De 1959 à 1994 le secrétariat du CSM est exercé par des magistrats qui
sont très proches du Président de la République, qui peuvent être en
même temps son conseil er technique pour les affaires judiciaires. Sous
secrétaire. Sous la présidence de François Mitterrand, Mme Danièle
Burguburu a été secrétaire du CSM, de 1981 à décembre 1992, date à
laquelle elle a été nommée au tour extérieur conseil er d'Etat en service
de M. Georges Dayan, un ami intime du Président de la République, qui
depuis 1981 était, notamment, chargée au palais de l'Elysée des affaires
judiciaires.)
II. Ses attributions en matière de nomination des magistrats
Le Conseil peut être consulté par le Président de la République sur
toutes les questions concernant l'indépendance de la magistrature. Il
nous étudieront ultérieurement.
Chaque formation du CSM peut charger un ou plusieurs de ses
formations.
Mais ses attributions les plus importantes concernent les nominations
des magistrats.
A) La nomination des magistrats du siège
Les magistrats à la Cour de cassation, les premiers présidents de cour
par le Président de la République, sur proposition du Conseil supérieur
de la magistrature.
Après avoir examiné les dossiers des candidats, entendu certains
Les autres magistrats sont nommés par le Président de la République,
sur proposition du Garde des Sceaux, et après avis conforme du CSM.
B) La nomination des magistrats du parquet
nommés par le Président de la République, sur proposition du ministre
de la justice, et après avis du CSM.
Contrairement à la nomination des magistrats du siège, cet avis ne lie
pas le ministre de la justice qui peut proposer au Président de la
République un candidat qui aurait reçu un avis négatif de la part du
Les plus hauts magistrats du parquet, les procureurs généraux, sont
nommés directement en Conseil des ministres.
Sous-section 2. Le déroulement de la carrière des magistrats
I. La hiérarchie judiciaire
La hiérarchie judiciaire a été profondément modifiée par la loi du 25 juin
2001. El e comprend désormais trois niveaux, le second grade, le
premier grade et la hors hiérarchie.
Le second grade correspond à des emplois de début de carrière. Au
peines, juge des enfants. Au parquet, celles de substitut du procureur.
centrale du ministère de la justice.
Au-dessus, se trouve le premier grade. Pour y accéder, il faut justifier de
président de la Cour de cassation et composé du Procureur général près
judiciaires, du directeur des services judiciaires, de 2 représentants des
premiers présidents et 2 représentants des procureurs généraux et de 10
représentants élus des magistrats (nous avons vu également que la
recrutement direct des magistrats).
premier président ou son procureur général et justifier des qualités
voulues pour accéder au grade supérieur.
de tribunal, de vice-président, premier vice-président, vice-président
conseil er référendaire à la Cour de cassation, au parquet de procureur
de la République, de procureur de la République adjoint, de vice-
procureur, du substitut général de secrétaire général ou de 1er substitut à
Enfin, au sommet, se trouve la hors hiérarchie, qui comporte, au siège,
les fonctions de Premier président, président de chambre et conseil er,
premier président, de président de chambre, de procureur général et
procureur et de procureur-adjoint des tribunaux de grande instance les
plus importants.
Pour pouvoir être nommé à la hors hiérarchie, il faut avoir exercé des
fonctions du premier grade dans deux juridictions différentes.
premier grade pour accéder à la hors hiérarchie.
supérieur hiérarchique qui peut, ainsi, être amené à apprécier la qualité
de son activité juridictionnelle.
des procureurs généraux et des magistrats hors hiérarchie de la Cour de
hiérarchique.
Celui-ci, après un entretien individuel, et le cas échéant, après avoir
une appréciation littérale et une gril e analytique, portant aussi bien sur
qualités de bon sens, la sûreté du jugement, la capacité à décider,
laquelle le supérieur hiérarchique mentionne les fonctions auxquelles le
magistrat est apte et ses besoins de formation.
Cette évaluation constitue un élément important de responsabilisation
Section I. Définition
va le juger. Cette assurance est un élément essentiel du droit au procès
une obligation de neutralité lui interdisant tout préjugé et tout parti pris à
l'encontre de l'un des plaideurs.
contraintes plus ou moins diffuses de son milieu social ou de ses
car sa détermination dépend de la subjectivité du sujet. Pour la
jurisprudence, elle est toujours présumée3 et il appartient au plaideur qui
s'en plaint de rapporter la preuve de partialité du juge.
Or celle-ci est presque impossible à rapporter car il est très difficile
des éléments objectifs, extérieurs à la personne en question. Selon cette
conception, non seulement le juge doit être intrinsèquement impartial,
mais encore, les circonstances dans lesquelles il intervient ne doivent
partialité. El e se détermine ainsi, selon la jurisprudence de la Cour
indépendamment de la conduite personnelle du juge, certains faits
L'apparence est donc un facteur d'appréciation de cette impartialité
objective par référence soit à la composition du tribunal saisi de la
"cause", donc à un facteur organique, soit à la connaissance ou
l'intervention du juge à l'occasion de fonctions antérieures dans une
même "cause", donc à un facteur fonctionnel. L' « apparence » comme
critère primordial d'appréciation de l'exigence d'impartialité objective
s'exprime par la formule "justice must not only be done, it must also be
2 CEDH Piersak c/ Belgique 1er octobre 1982 - rec. 8692/79
contentieux répétitifs entre les mêmes parties
conduite à élaborer une jurisprudence fournie dont la ligne directrice peut
être ainsi résumée : ne peut siéger dans une affaire le juge dont la
même affaire, est de nature à affecter sa liberté de jugement et donc à
provoquer chez le plaideur la crainte légitime que la formation de
jugement à laquelle il appartient n'offrira pas les garanties suffisantes
d'impartialité6.
des incapacités de juger et des procédures destinées à modifier la
posteriori la nullité de la décision.
Sous-section 1. Les incapacités
dispense accordée par décret, si du moins le tribunal comporte plusieurs
6 parmi les décisions les plus remarquables en la matière peut-on citer Cass. 2eme civ 10 octobre
note J-F. Burgelin. p. 53, note M-A. Frison-Roche. Gaz. Pal. 15 décembre 1998 p. 12, note F.-J. Pansier et J.-B.
Bladier, selon lequel dès lors un juge qui a statué en référé sur une demande tendant à l'attribution
d'une provision en raison du caractère non sérieusement contestable d'une obligation, ne peut ensuite
1, note J-F. Burgelin. p. 53, note M-A. Frison-Roche. Gaz. Pal. 15 décembre 1998 p. 12, note F.-J. Pansier et J.-
B. Bladier.)
parties (art R 721-3 du COJ).
Sous-section 2. Les procédures tendant à faire modifier la
plusieurs de ses juges.
un risque que son impartialité soit mise en cause, de se retirer
entière peut les faire écarter en procédant à la récusation ou en
demandant le renvoi pour cause de suspicion légitime.
I. La récusation
La récusation peut être définie comme la procédure par laquelle un
plaideur demande que soit évincé de la composition de la
Les causes de récusation sont énumérées par les codes de
le juge ou son conjoint a un intérêt personnel à la
parent ou allié, en procès ou lié par lien de
jurisprudence considère que la connaissance que l'un
des juges composant le tribunal peut avoir du litige,
dans le cadre de fonctions antérieures, et ou que les
décisions qu'il a prises dans la même affaire sont de
nature à provoquer chez le plaideur la crainte légitime
que la formation de jugement comprenant ce juge
n'offre pas les garanties suffisantes d'impartialité 7;
il existe une amitié ou une inimité notoire entre le juge
et les parties.
II. La demande de renvoi pour cause de suspicion légitime
Tandis que la récusation concerne un juge déterminé, en raison de
circonstances purement individuelles, la procédure de renvoi est
utilisable lorsque la suspicion plane sur la juridiction toute entière.
Dans ce cas, le plaideur demande, en matière civile, à la juridiction
affaire.
En matière pénale, la demande est portée devant la Chambre criminelle
de la Cour de cassation.
Sous-Section III la nullité de la décision rendue par un magistrat
évolution.
objectivement susciter un doute sur son impartialité. Il en est notamment ainsi lorsque le juge fait partie de la
révision- formé contre une décision juridictionnelle que ce juge avait rendue ou à laquelle il a apporté son
préjugement sur la même affaire (par exemple pour le juge des référés qui a précédemment statué sur
excessive, ainsi que le soulignaient certains auteurs9, si elle aboutissait à
ne se révélait que postérieurement à la clôture des débats, plus
singulièrement encore lorsque les motifs mêmes de la décision rendue
Une décision rendue le 14 septembre 200610 par la deuxième
chambre civile de la Cour de cassation répond heureusement à ces
de dommages-intérêts formée par deux locataires, un juge de proximité
particulièrement injurieux envers le bail eur. Ainsi pouvait-on y lire "la
piètre dimension de la défenderesse qui voudrait rivaliser avec les plus
grands escrocs, ce qui ne constitue nullement un but louable en soi sauf
pour certains personnages pétris de malhonnêteté comme ici Mme X...
dotée d'un quotient intellectuel aussi restreint que la surface habitable de
sa caravane, ses préoccupations manifestement strictement financières
et dont la cupidité le dispute à la fourberie, le fait qu'elle acculait ainsi
sans état d'âme et avec l'expérience de l'impunité ses futurs locataires et
impunément du moins jusqu'à ce jour, les agissements frauduleux ou
crapuleux perpétrés par elle nécessitant la mise en oeuvre
d'investigations de nature à la neutraliser définitivement" .
qui étaient manifestement incompatibles avec l'exigence d'impartialité
examiner le fond, elle casse et annule la décision sur le fondement de
partie et la méconnaissance aussi flagrante de ses devoirs privait sa
de fonction juridictionnelle, le juge était sorti gravement des limites de
des débats puisque, en quelque sorte, les motifs du jugement
motivation de la décision elle-même11. La Cour de cassation affirme ainsi
décision dont les motifs ne sont pas empreints de partialité.
hapitre 4. La responsabilité des magistrats 12
Section I. Position du problème
Poser la question de la responsabilité du juge suppose donc de définir
profession ?
formulé, sans utilité pour la solution du litige, en dehors de tout débat contradictoire avec les intéressés, des
responsabilité des magistrats : contribution à une réflexion apaisée, D 2005, Doctrine p 2414)
Mais la responsabilité du juge ne peut se résoudre de la même façon
rendre service à personne, porte par nature préjudice à une partie. La
décision de justice a nécessairement pour finalité et pour objet de
justice est, par essence, préjudiciable, désagréable et porteur de
faute du juge qui, en adoptant un raisonnement erroné, ou en faisant une
fausse application de la loi, ou en tenant pour faux ce qui et vrai, ou
inversement, a commis une erreur judiciaire.
pouvant porter sur les faits comme sur le droit.
situation de fait sur laquelle repose sa décision et que, partant, il rende
une décision injuste. Pour autant, une telle erreur lui est-elle imputable ?
respectives des parties.
en la cause (ce qui explique notamment le principe de la relativité de
est une vérité relative : les éléments pris en compte par le juge peuvent
ne refléter que partiellement la situation des parties en matière civile, ou
les faits imputables au défendeur en matière pénale13.
Le juge est aussi tributaire de la qualité des éléments de preuve qui lui
sont produits, voire de leur admissibilité. Ainsi, par exemple, il ne peut,
en matière civile, se fonder sur des éléments de preuve dont il aurait
parties. Le juge ne peut non plus se fonder sur des éléments de preuve
recueil is de façon déloyale14 ou qui ne correspondent pas aux
autres que littérales en matière de contrat). Ainsi, en droit civil la
droit sans remettre en cause le principe de liberté de la loi par le juge qui
découle de la prohibition des arrêts de règlement ?16. En effet, tout juge
très bien, sans commettre la moindre faute, adopter sur un point de droit
déterminé une doctrine différente de celle qui a été consacrée par une
juridiction supérieure devant laquelle sa décision sera déférée. On a déjà
par une juridiction hiérarchiquement supérieure ?
autant, peut-on lui reprocher cette « erreur de droit » ?
juridique en permettant de remettre en cause une décision revêtue de
Le souci de conforter celui qui a perdu son procès doit-il passer par le
parfaite, le juge en est réduit à se prononcer en faveur de la meil eur
preuve17 .
la liberté de juger ou de ne pas juger. A vouloir trop responsabiliser les
choisir de ne pas juger, on risque fort, au mieux, de les décourager au
pire, à les inciter au conservatisme.
La dimension collective de la décision judiciaire complique encore
singulièrement les données du problème. La collégialité et le secret des
délibérés forment un écran derrière lequel la décision individuelle
la responsabilité des magistrats sans violer le principe du secret des
délibérations ?
Comme tout autre agent public, « la société a le droit de lui demander
garanties apportées au justiciable, et non comme des privilèges dévolus
aux magistrats.
Il serait donc anormal que les magistrats puissent, sous prétexte
contrepartie de leur indépendance.
Poser la question de la responsabilité du juge revient donc à la fois
fonctionnement défectueux du service de la justice et le régime
disciplinaire des magistrats.
Section II. La responsabilité de la justice
Comme pour les autres agents publics, le magistrat ne peut voir sa
responsabilité civile directement engagée par un justiciable pour une
effet, de quatre actions distinctes.
781-1), introduit par la loi du 5 juil et 1972, prévoit que « l'Etat est tenu
de réparer le dommage causé par le fonctionnement défectueux du
professionnels .
dommage conformément à l'article 11.1 de l'ordonnance du 22 décembre
1958 mais uniquement en cas de faute personnelle de sa part.
Cette action récursoire est engagée devant une chambre civile de la
Cour de cassation.
ce fondement juridique.
traditionnellement définie comme « celle qui a été commise sous
Récemment, la Cour de cassation a assoupli cette définition par un arrêt
de l'assemblée plénière en date du 23 février 200118, rendu au sujet de
toute déficience caractérisée par un fait ou une série de faits traduisant
investi »19.
revêtent pas de caractère juridictionnel ayant autorité de la chose jugée
qui ne sont, selon la formule même du Conseil constitutionnel,
recours prévues par la loi.
Ont ainsi été récemment jugés que commettaient une telle faute :
l'erreur commise par le ministère public sur les conditions
juridiques de l'engagement des poursuites puis, l'absence
de vérification du juge d'instruction sur la régularité de sa
saisine.20
Le fait pour une juridiction d'avoir laissé s'écouler le délai
imparti pour statuer sur la mise en liberté, sans que ce
retard, impliquant la mise en liberté d'une personne
condamnée à 14 ans de réclusion criminelle, puisse être
Debbash
imputable à une circonstance imprévisible et insurmontable,
extérieure au service de la justice21.
non juridictionnels, comme par exemple des irrégularités commises par
Cela étant, on observera deux décisions de juridictions du fond, mais qui
dans son activité juridictionnelle :
dans une affaire jugée par le TGI de Rennes (cité in D
immeuble dans lequel était exploité un fond de commerce
était en ruine, acculant ainsi à la fail ite les exploitants. (il
faut dire que le président de la chambre qui avait rendu la
décision litigieuse avait lui-même écrit aux plaignants une
lettre dans laquelle il reconnaissait son erreur,
une faute lourde le juge aux affaires familiales qui, après
moyen à la demande de la mère » avait fixé la résidence
maladie mentale, élément qui était dans le débat, et que,
négligences respectivement imputables au juge, au parquet
et aux services du greffe.
22 CA Paris 29 janvier 1997, Gaz. Pal. Du 15 mai 1997
Par ail eurs, la jurisprudence récente de la Cour de justice des
communautés européennes va dans le sens de la responsabilité de
En effet, dans son arrêt, la CJCE considère que la violation manifeste du
droit communautaire par une juridiction nationale statuant en dernier
causés aux particuliers23
On précisera enfin que, depuis la loi du 5 mars 2007, toute décision
définitive d'une juridiction nationale ou internationale condamnant l'Etat
pour fonctionnement défectueux du service de la justice est
communiquée aux chefs de cour d'appel intéressés par le garde des
sceaux, ministre de la justice. Le ou les magistrats intéressés sont avisés
dans les mêmes conditions et des poursuites disciplinaires peuvent alors
être engagées par le ministre de la justice et les chefs de cour d'appel
intéressés dans les conditions que nous examinerons plus bas.
Parallèlement à cette action de droit commun coexistent des régimes
spéciaux de responsabilité.
juge des tutelles, soit par son greffier, soit par le greffier en chef du
majeur protégé ou le mineur, il peut néanmoins, en théorie du moins,
Le code de procédure pénale prévoit pour sa part deux actions
23 CJCE 30 septembre 2003, Kôbler c.Autriche aff. C-224/01, JCP 2003, ed. Adm et collectivités territoriales p
faute fondée, comme souvent en matière de responsabilité
sur les citoyens.
après avoir été condamnées, ont été ensuite reconnues innocentes par
la cour de révision.
ne peut être obtenue que pour des faits survenus postérieurement à la
connaissance du juge.
Section III. La discipline des magistrats
Sous-section 1. Droits et devoirs des magistrats
prises par les juges impliquent, de leur part, des devoirs très particuliers
qui vont au-delà des obligations incombant normalement à des agents
publics.
Comme tous les autres fonctionnaires, ils sont tenus de résider au lieu
sont protégés contre les menaces et les attaques de quelque nature que
les magistrats à des interdictions et leur imposent des incompatibilités.
I. Interdictions
La loi interdit aux magistrats, sous peine de sanction disciplinaire, de se
livrer à certaines activités qui seraient de nature à troubler le bon
fonctionnement du service public de la justice.
seulement dans son activité professionnelle mais aussi dans sa vie
façon digne et loyale.
Le magistrat est par ail eurs tenu de rendre la justice. Cette obligation de
continuité dans le service public conduit à lui dénier le droit de grève ou
de toute autre action concertée de nature à arrêter ou à entraver le
de manifester leur mécontentement par des actions symboliques telles
que défilé dans les couloirs du palais de justice, renvoi des affaires,
cette qualité, de toute manifestation de caractère politique qui serait
incompatible avec leur obligation de réserve.
Cela ne signifie pas que les magistrats soient dépourvus de droits
doivent pas prendre, en tant que magistrat, de positions publiques
partisanes.
Cette interdiction individuelle est naturellement encore plus pressante
pour le corps de la magistrature tout entier auquel on interdit toute
au principe ou à la forme du gouvernement de la République.
syndicats (il existe actuellement 3 organisations syndicales de
magistrature et FO magistrature).
II. Incompatibilités
fonctions judiciaires et quelques autres.
de compromettre sa liberté de jugement. Cette règle reçoit toutefois des
exceptions pour travaux scientifiques, littéraires et artistiques que les
supérieur hiérarchique, ils peuvent aussi se livrer à des travaux
En revanche, depuis la loi du 25 juin 2001, ils ne peuvent plus se livrer à
En application du principe de la séparation des pouvoirs, il est également
un magistrat de se présenter à des élections, mais il doit se placer en
ou municipaux, mais uniquement dans le ressort auquel appartient le
magistrat. Cette règle ne joue pas pour les magistrats de la Cour de
République.
Enfin, nul magistrat ne peut être nommé dans une juridiction dans le
ressort de laquelle il a exercé depuis moins de 5 ans des fonctions
Sous-section 2. Définition de la faute disciplinaire
Contrairement à une idée reçue, les magistrats sont pénalement
fonctions, lorsque les faits qui leur sont imputables sont susceptibles
d'une qualification pénale, notamment en cas de concussion ou de
leur qualité.
Celle-ci leur impose au contraire une déontologie exigeante et les
soumet à un régime disciplinaire rigoureux.
La faute disciplinaire est un manquement aux obligations
bien comprise.
En effet, la fonction principale du magistrat consiste à rendre des
décisions juridictionnelles.
Or, le contenu de ces décisions n'est pas de nature à justifier une
une quelconque appréciation sur les actes juridictionnels des juges,
lesquels relèvent du seul pouvoir de ceux-ci et ne sauraient être critiqués
cause de sanction disciplinaire.
et systématique, outrepassé sa compétence ou méconnu le cadre de sa
étranger à toute activité juridictionnelle » disciplinaire26. Le juge cesse
alors d'être juge, est devient apte à la sanction.
Constituent en revanche des fautes disciplinaires tout manquement aux
dignité.
Exemple : infractions pénales, retards dans ses jugements, etc.
Ces fautes peuvent conduire le magistrat à devoir rendre des comptes
devant le Conseil supérieur de la magistrature pour les magistrats du
siège, et devant le Garde des Sceaux, après avis du Conseil supérieur
de la magistrature , pour les magistrats du parquet,
Entre 2002 et 2006, 15 magistrats ont été poursuivis et 22 sanctions ont
été prononcées.
La modification avortée par la loi du 5 mars 2007
de leur activité juridictionnelle.
Cherchant le moyen d'élargir la possibilité de mettre en cause la
responsabilité disciplinaire des magistrats, la commission d'enquête
parlementaire sur l'affaire d'Outreau était parvenue à la conclusion
suivante :
Décision du 27 juin 1991,
26 décision du 8 février 1981 op. cit. également décision du 14 décembre 1994
dysfonctionnements de la justice dans l'affaire dite d'Outreau et de formuler des propositions pour éviter leur
renouvellement (Assemblée nationale, 6 juin 2006).
« En étant très attachée à préserver les actes juridictionnels, qui
échapperaient à toute mise en cause possible, votre commission, quant
à el e, propose que la méconnaissance manifeste par les juges des
principes directeurs de la procédure civile et pénale puisse engager leur
ancrage législatif dans le code de déontologie appelé à figurer dans le
statut 28».
S'inspirant de cette proposition, le projet initial du Gouvernement
prévoyait l'insertion, dans l'article 43 de l'ordonnance de 1958, relatif à la
faute disciplinaire, de l'alinéa suivant : « La violation délibérée des
principes directeurs de la procédure civile ou pénale est constitutive
d'une faute disciplinaire ».
Cette disposition était contraire aux principes de la séparation des
pouvoirs et de l'indépendance de l'autorité judiciaire, car elle recelait un
risque de confusion entre l'office des juges d'appel et de cassation, d'une
part, et celui du juge disciplinaire, d'autre part.
d'Etat admettent que les manquements graves et réitérés aux devoirs de
son état que constituent les violations, par un magistrat, des règles de
compétence et de saisine de sa juridiction sont de nature à justifier une
sanction disciplinaire, c'est après avoir constaté que les faits reprochés
ont été établis dans des décisions juridictionnelles devenues définitives.
Ne voulant pas retarder la discussion du projet de loi, le Gouvernement a
déposé ce dernier sur le bureau de l'Assemblée nationale en en excluant
la disposition relative à la faute disciplinaire, a déclaré l'urgence, puis a
déposé un amendement portant article additionnel.
Tel qu'adopté par l'Assemblée nationale, cet amendement insérait dans
l'article 43 de l'ordonnance un alinéa ainsi rédigé :
« Constitue notamment un manquement aux devoirs de son état la
violation grave et intentionnelle par un magistrat d'une ou plusieurs
règles de procédure constituant des garanties essentielles des droits des
parties, commise dans le cadre d'une instance close par une décision de
justice devenue définitive ».
Conscient des problèmes d'ordre constitutionnel soulevés par la
rédaction adoptée par l'Assemblée nationale, le Sénat a adopté une
disposition d'une portée toute différente, ainsi rédigée :
« Constitue un des manquements aux devoirs de son état la violation
grave et délibérée par un magistrat d'une ou plusieurs règles de
procédure constituant des garanties essentielles des droits des parties,
constatée par une décision de justice devenue définitive ».
La différence essentielle tenait dans ce dernier membre de phrase.
La commission mixte paritaire a abouti à un accord sur le texte suivant,
ultérieurement adopté en termes identiques par les deux assemblées :
« Constitue un des manquements aux devoirs de son état la violation
grave et délibérée par un magistrat d'une règle de procédure constituant
une garantie essentielle des droits des parties, commise dans le cadre
d'une instance close par une décision de justice devenue définitive ».
Cette formulation, très proche de celle adoptée par l'Assemblée
nationale en première lecture, portait atteinte à deux principes
constitutionnels : l'indépendance de l'autorité judiciaire, garantie par
l'article 64 de la Constitution29, et la séparation des pouvoirs, proclamée
par l'article 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de
Certes, ces principes n'interdisent pas au législateur organique d'étendre
la responsabilité disciplinaire des magistrats à leur activité juridictionnelle
en prévoyant que la responsabilité disciplinaire d'un magistrat est
engagée pour une violation grave et délibérée d'une règle de procédure
constituant une garantie essentielle des droits des parties.
Toutefois, c'est à condition que l'engagement de poursuites disciplinaires
à l'encontre d'un magistrat, à raison de l'exercice de ses fonctions
juridictionnelles, repose sur une violation des devoirs de son office
préalablement constatée par une décision de justice devenue définitive.
janvier 1995, cons. 4
Considérant, en outre, que dans l'exercice de sa compétence, le législateur organique doit se conformer aux
règles et principes de valeur constitutionnelle ; qu'en particulier, doivent être respectés non seulement le
principe de l'indépendance de l'autorité judiciaire et la règle de l'inamovibilité des magistrats du siège, comme
l'exige l'article 64 de la Constitution, mais également le principe proclamé par l'article 6 de la Déclaration des
droits de l'homme et du citoyen, selon lequel tous les citoyens étant égaux aux yeux de la loi, ils " sont également
admissibles à toutes dignités, places et emplois publics, selon leur capacité, et sans autre distinction que celle de
1995, cons. 4).
L'arrêt précité du Conseil d'Etat du 5 mai 1982 il ustre le fait que
l'exigence du constat préalable de la violation de la procédure par une
décision de justice n'aboutit pas à une confusion entre l'office du juge de
la procédure et l'office du juge disciplinaire.
déclarée non conforme à la Constitution par le Conseil constitutionnel qui
a retenu que si le principe de l'indépendance de l'autorité judiciaire,
garanti par l'article 64 de la Constitution, et celui de la séparation des
pouvoirs, proclamé par l'article 16 de la Déclaration des droits de
l'homme et du citoyen de 1789, n'interdisent pas au législateur organique
d'étendre la responsabilité disciplinaire des magistrats à leur activité
juridictionnelle en prévoyant qu'une violation grave et délibérée d'une
règle de procédure constituant une garantie essentielle des droits des
parties puisse engager une telle responsabilité, ces mêmes principes
font obstacle à l'engagement de poursuites disciplinaires sans que cette
violation ait été préalablement constatée par une décision de justice
devenue définitive31.
L'article 21 de la loi prévoyait aussi que toute personne pouvait saisir
d'une réclamation le Médiateur de la République lorsqu'elle considérait, à
l'occasion d'une affaire la concernant, que le comportement d'un
magistrat constituait une faute disciplinaire.
Il trouvait son origine dans une proposition de la commission d'enquête
parlementaire sur l'affaire d'Outreau, qui, pour favoriser l'examen des
réclamations des justiciables s'estimant lésés par un dysfonctionnement
du service de la justice ou par le comportement d'un magistrat, suggérait
de le confier au Médiateur et de permettre à celui-ci de saisir le CSM32.
Sans doute cette procédure présentait-elle des garanties :
elle excluait toute appréciation du Médiateur sur les actes
juridictionnels ;
elle laissait au Garde des sceaux toute latitude quant à
l'opportunité de saisir le Conseil supérieur de la magistrature,
Médiateur estimait finalement devoir lui transmettre la réclamation.
31 Décision 2007-551DC du 1er mars 2007
Ces éléments, a jugé le Conseil, ne pouvaient toutefois prévaloir sur une
jurisprudence qui, au nom de la séparation des pouvoirs, interdit de faire
d'un organisme administratif l'acteur d'une procédure juridictionnelle.
Dans une décision de 1990, le Conseil a en effet jugé, sur le fondement
des dispositions de l'article 64 de la Constitution pour les juridictions
judiciaires, et sur le fondement d'un principe fondamental reconnu par
les lois de la République pour les juridictions administratives, que
l'indépendance des juridictions et le caractère spécifique de leurs
fonctions excluent tout empiètement d'autorités administratives33. Il avait
ainsi émis une réserve quant au rôle de la commission nationale des
comptes de campagne et des financements politiques par rapport au
juge administratif34.
La confusion des genres créée en l'espèce par l'intervention du
Médiateur de la République, autorité administrative, dans une procédure
disciplinaire visant un magistrat, laquelle pouvait être difficilement
dissociable de l'instance première, était constitutive d'un empiètement de
l'administration sur une activité juridictionnelle.
En effet, si le Médiateur ne pouvait porter une appréciation sur les actes
juridictionnels, il avait néanmoins le droit de « solliciter tous éléments
d'information utiles » auprès des chefs de cour d'appel ou des tribunaux
supérieurs d'appel. Lorsqu'il estimait que les faits en cause étaient de
nature à recevoir une qualification disciplinaire, il transmettait la
réclamation au ministre de la justice aux fins de saisine du Conseil
supérieur de la magistrature. Le garde des sceaux n'était certes pas tenu
d'engager des poursuites disciplinaires, mais il devait, s'il ne le faisait
pas, en informer le Médiateur par une décision motivée. Le Médiateur
pouvait alors « établir un rapport spécial qui est publié au Journal
officiel ».
Compte tenu de l'ensemble des prérogatives ainsi accordées au
Médiateur, le Conseil constitutionnel a donc censuré l'article 21 de la loi
organique comme contraire à l'indépendance de l'autorité judiciaire et à
la séparation des pouvoirs.
Comparaison avec les pays européens
Le principe selon lequel un juge ne peut être inquiété en raison du
financement des activités politiques, cons. 6 et 7
34 en rappelant que la position de la commission nationale des comptes de campagne et des financements
politiques « lors de l'examen des comptes de campagne d'un candidat, ne saurait en aucune façon s'imposer au
juge administratif ; que celui-ci conserve toute liberté pour apprécier, au besoin par la voie de l'exception, si
c'est à bon droit que la commission a constaté le dépassement par un candidat du plafond des dépenses
électorales imposé par la loi et pour en tirer, le cas échéant, toutes conséquences de droit, notamment en ce qui
contenu de ses décisions juridictionnelles est appliqué par les pays
suivants : Bulgarie, Canada, Danemark, Grèce, Hongrie, Irlande,
Estonie, Lettonie, Pays Bas, République Tchèque, Suède (liste non
exhaustive).
Parmi les pays qui ne retiennent pas ce principe, on peut noter les
situations suivantes : si le juge emploie inutilement des termes
particulièrement durs ou violents, (Norvège), ou encore inappropriés,
irrespectueux (Espagne) , racistes, sexistes, révisionnistes ou passibles
de toute autre incrimination pénale (Luxembourg). En Belgique35,, le juge
peut être poursuivi disciplinairement chaque fois que le contenu ou les
conséquences de son jugement constituent une infraction à ses
obligations déontologiques, tels que, par exemple un manquement à son
devoir de motivation. La Cour de cassation belge admet aussi le principe
juridictionnelle à la triple condition :
la décision juridictionnelle fautive doit avoir été au préalable
normalement et prudent
le dommage ne peut être réparé par le seul exercice de la voie de
recours36.
Une solution assez proche est admise par la juridiction suprême du
Luxembourg37
juridictionnelle ont été, récemment, créés. En Pologne, comme en
disciplinaire.
35 Cass belge 19 décembre 1991, Revue crit. jur belge 1993.285 note Rigaux et
Van Compernolle ; 8 décembre 1994, Journal de Liège, Mons et Bruxelles, 199,
sous la direction de M. Degueurgue, PUF 2003, p 60
36 S. Guincahrd, La responsabilité des magistrats, Gaz Pal 7/8 avril 2006 p 2, J.
sous la direction de M. Degueurgue, PUF 2003, p 60
37 V.-G. Ravaranie, La responsabilité civile des personnes privées et publiques,
ALLEMAGNE38 : La responsabilité pénale des juges peut être engagée
cette violation délibérée se trouvent réunis lorsque le juge se rend
délibérée de la loi en dirigeant une procédure ou en statuant sur une
importante à la bonne administration de la justice, il faut que le juge se
orienté ses actes en fonction de critères étrangers à la loi. Dans le
champ disciplinaire la faute est définie de façon globale comme un
manquement aux devoirs de sa fonction ; la procédure est, par ail eurs,
globalement, celle des poursuites disciplinaires des fonctionnaires, le
générale, à celui de la responsabilité des fonctionnaires..
ESPAGNE39 : il existe un délit pénal de prévarication : rendre en
connaissance de cause une décision manifestement injuste du fait de
lorsque de façon claire et évidente, sans aucun doute possible à cet
égard, la décision judiciaire manque de toute explication raisonnable
disciplinaires sont, par ail eurs, définies, de façon précise par une liste,
selon trois degrés de gravité (très grave, grave et légère). Il existe, en
outre, une responsabilité civile personnelle pour dol, ou ignorance
inexcusable et il est signalé une condamnation de ce chef des 11
magistrats du tribunal constitutionnel par un arrêt de la Cour de
cassation du 23 janvier 2004.
ITALIE40 : si avant une loi de 2005 initiée par le gouvernement de
Berlusconi, aucun texte ne décrivait les contours juridiques des fautes
disciplinaires, la cour se prononçant en chambres réunies),
désormais, constitue une infraction disciplinaire : la violation
grave de la loi déterminée par une faute inexcusable,
de Madrid lors du même colloque
40selon un article de Maria Giuliana Civini, magistrat à la Cour de cassation,
ancien membre du CSM
décision comportant une contradiction entre motivations et
activité juridictionnelle. Le texte précise, toutefois, que
constituer une infraction disciplinaire (alors que pendant les
travaux parlementaires la prohibition de la Ajurisprudence
créative@avait été prévue mais fut, finalement, écartée) .
Par ail eurs, la jurisprudence récente de la Cour de justice des
communautés européennes va dans le sens de la responsabilité de
En effet, dans son arrêt, la CJCE considère que la violation manifeste du
droit communautaire par une juridiction nationale statuant en dernier
causés aux particuliers41
Sous-section 3. Procédure disciplinaire
magistrature, saisi par le Garde des Sceaux. Depuis la loi de juil et 2000,
il peut être aussi saisi directement par le supérieur hiérarchique du
magistrat, premier président ou procureur général.
En matière disciplinaire, le Président de la République et le ministre de la
à la Cour de cassation.
pour les magistrats du siège : la formation compétente
pour les magistrats du siège statue comme conseil de
discipline des magistrats du siège. El e est alors présidée
par le Premier président de la cour de cassation.
pour les magistrats du parquet : la formation compétente,
qui est alors présidée par le procureur général près la cour
de cassation, donne son avis sur les sanctions disciplinaires
41 CJCE 30 septembre 2003, Kôbler c.Autriche aff. C-224/01, JCP 2003, ed.
Adm et collectivités territoriales p 1943 note O. Dubos, Procédures, novembre
proposées par le ministre de la justice.
Les sanctions prononcées peuvent aller de la réprimande avec
inscription au dossier à la révocation avec ou sans suspension des droits
On notera aussi que la loi du 5 mars 2007 a aussi prévu la possibilité de
avec l'exercice de ses fonctions.
Chapitre 5. Le statut du ministère public
Les juridictions ne sont pas composées exclusivement de magistrats
chargés de juger. Aux cotés des juges, ou magistrats du siège,
observations à la formation de jugement et, au besoin, en saisissant lui-
lorsque le Roi voulait défendre ses intérêts devant les tribunaux, il
confiait cette mission à des avocats.
cette mission se transforma en office. Ainsi, les procureurs du Roi
à la défense des intérêts du Roi et ceux de la société, qui se
salle, espace clos et sacré, petit parc, ou « parquet », que traversaient
parquet le procès-verbal.
organisé de façon structurée et hiérarchisée. Cette organisation, qui
procureur.
pourvues les juridictions de droit commun ; les tribunaux de grande
responsabilité que sont exercées les attributions du ministère public
devant ce tribunal.
Le procureur de la République exerce aussi le ministère public devant
toutes les autres juridictions du premier degré établies dans son ressort
territorial. Devant le tribunal de police, il peut se faire représenter, pour
les contraventions des quatre premières classes, par un commissaire de
généraux et de substituts généraux. Le procureur général non seulement
dirige les services du parquet général, mais aussi à autorité sur
A la Cour de cassation, se trouve un Procureur général, assistés
Section II. Les caractères du ministère public
A la différence des magistrats du siège, les magistrats du parquet
appartiennent à une organisation fortement structurée qui se distingue
par sa structure hiérarchique et son indivisibilité.
Sous-section 1. La structure hiérarchique du ministère public
Les magistrats du parquet sont considérés comme des agents du
du 22 décembre 1958, ils sont placés sous la direction et le contrôle de
ministre de la justice. Le ministre de la justice peut donc donner des
ordres à tous les membres du ministère public et les procureurs
généraux aux procureurs de la république de leur ressort.
Ce principe de hiérarchie est cependant tempéré par deux correctifs :
est propre. Il en résulte que le Garde des Sceaux ne peut
les ordres de leurs supérieurs hiérarchiques, produit tous
ses effets de droits.
mais la parole est libre », tout membre du parquet conserve
membres du parquet.
sont en quelque sorte interchangeables.
Section III. Les attributions du ministère public
Sous-section 1. Attributions en matière civile
surveil ance des greffes et des officiers ministériels, la vérification des
titre suivant que le ministère public est partie principale ou partie jointe.
I. Le ministère public partie jointe
opinion et indiquer au tribunal, par ses réquisitions, la solution qui, selon
du dossier est obligatoire à son égard (par exemple en droit de la
du parquet.
II. Le ministère public partie principale
Le ministère public peut aussi intervenir devant les tribunaux civils
comme partie principale. Il ne se borne plus alors à se joindre à un
procès mais intervient soit pour déclencher lui-même le procès en qualité
de demandeur, soit en qualité de défendeur lorsque le procès est dirigé
contre lui.
Il se présente comme une véritable partie au procès.
personnes (état civil, nationalité, mariage) en matière de tutelle des
entreprise.
Sous-section 2. Attributions en matière pénale
Les attributions du ministère public en matière pénale sont de loin les
A ce titre, il lui est conféré une triple prérogative :
déclenche les poursuites en saisissant la juridiction pénale,
de procédure devant cette juridiction. A cet effet, il lui
Il convient cependant de préciser que si le ministère public peut engager
décider éventuellement de ne pas poursuivre une infraction pour des
motifs de pure opportunité. A cet effet, il peut, en toute légalité, décider
de classer sans suite les plaintes et les dénonciations qui lui sont
adressées.
saisir elle-même la juridiction pénale en se constituant partie civile.
délinquance, le procureur de la République est chargé aussi de veil er à
la prévention des infractions à la loi pénale.
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27/02/2011


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Français


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