La Carte et le Territoire de Michel Houellebecq (Fiche de lecture)

Le meurtre de Michel Houellebecq est résolu trois ans plus tard. Dans le cadre d'une obscure histoire de trafic d'insectes, on découvre dans la demeure d'un chirurgien le portrait de Houellebecq (p. 385). Le tableau, évalué désormais aux environs de douze millions d'euros, est remis à Jed. Celui-ci, désoeuvré, se retire un instant dans l'ancienne maison de ses grands-parents où il retrouve ses dessins d'enfance, puis il décide de terminer sa vie dans un petit village isolé où, durant les trente dernières années de son existence, en proie à une mélancolie sinistre, il filme des photographies de personnes qu'il a connues (Olga, son père, etc.) en train de se détériorer à l'air libre sous l'action des éléments naturels. (p. 426).

Le personnage principal. De tempérament fort mélancolique, sa vie est parsemée de périodes de dépression (après ses études de photographie, p. 53). Devenu artiste reconnu grâce à sa rencontre avec Olga Sheremoyova qui l'introduit auprès de Michelin, il devient alors une sorte d'" objet de marché " : ses oeuvres d'art sont " cotées " et leur prix fluctue constamment selon les lois de l'offre et de la demande. Aidé par la puissance de l'entreprise Michelin et par une attachée de presse efficace, Marilyn Prigent, Jed Martin finit par connaitre un succès mondial. Cependant, ce succès ne suffit pas à lui amener le bonheur et à lui ôter son caractère mélancolique. Sa vie est ainsi surtout marquée par une grande solitude, dont tous les héros de Houellebecq semblent affectés, et qui est celle de l'homme occidental moderne condamné à n'être qu'un rouage dans l'engrenage d'une société capitaliste aveugle, tel Jed Martin qui, malgré ses succès professionnels, se retrouve toujours face aux problèmes fondamentaux que sont l'amour (et ensuite la perte) d'une femme (Olga) ou les relations conflictuelles avec la figure du père (Jean-Pierre Martin).

Père de Jed Martin. C'est un personnage décrépit extrêmement déprimant. Après avoir mené une carrière professionnelle d'architecte brillant, il est vieillissant et vit dans une solitude extrême au moment où Jed Martin est au sommet de son art. Répétant sans cesse son dégout de la vie, il ne désire qu'une chose : se faire euthanasier, ce qu'il finira par accomplir à la fin du roman. Entre le père et le fils, règne ainsi une sorte de fêlure. Les deux personnages sont en effet incapables de communiquer l'un avec l'autre, d'autant plus que le spectre de la mère de Jed, qui s'est suicidée, plane entre eux deux, ce qui teinte leur relation d'un caractère morbide. Ce type de personnage est fréquent dans les romans de Houellebecq. Il symbolise le vieillard impuissant (" avec un anus artificiel ", p. 342), aigri jusqu'à l'os.